L’accessibilité numérique: présentation & enjeux

L’accessibilité numérique

Le 21 février 2023, l’ISIT-BE a organisé un webinaire sur l’accessibilité numérique, avec l’intervention de Michel Dvorak. (replay disponible sur la page YouTube de l’ISIT-BE )

Qu’est-ce que l’accessibilité numérique ?

L’accessibilité numérique permet à toutes et tous, y compris aux personnes handicapées, d’accéder pleinement aux contenus numériques. Elle repose sur 4 principes : tout contenu doit être perceptible, utilisable, compréhensible et robuste (source: Nations Unies). 

Son but est d’adapter l’espace numérique aux besoins des utilisateurs afin de leur permettre de réaliser des tâches sans douleur ni difficulté. Cela implique de prendre en compte les différentes limitations des utilisateurs, telles que les déficiences visuelles, cognitives, auditives ou motrices, pour leur offrir une expérience utilisateur fluide et agréable.

Au-delà de sa fonction première – à savoir la mise à disposition de contenus pour tous les publics, sans discrimination – l’accessibilité numérique présente de nombreux avantages distincts, qui représentent autant d’opportunités pour les entreprises et organisations, au-delà d’une obligation légale : augmenter la satisfaction des utilisateurs, accroître le nombre de clients/visiteurs potentiels, permettre une navigation et un accès à l’information efficaces, lutter contre la fracture numérique, améliorer le référencement, etc. 

L’accessibilité numérique, c’est avant tout une culture à développer au sein des entreprises et des organisations pour garantir que leurs services et produits soient accessibles. L’accessibilité numérique n’est pas une étape unique ou un processus ponctuel, mais plutôt un travail continu qui doit être intégré à chaque étape de la création de contenus numériques. Pour y parvenir, il est nécessaire que les travailleurs impliqués soient formés et sensibilisés à ces enjeux.

Pour mieux comprendre l’impact de certains handicaps (déficience visuelle, cécité, déficience auditive, handicap moteur, daltonisme), n’hésitez pas à visiter Atalan.fr

Les personnes déficientes

Les personnes déficientes peuvent souffrir de différents troubles, qu’ils soient visibles ou invisibles, permanents ou temporaires. Environ 30 à 35% de la population aura un handicap à un moment ou à un autre de sa vie. (Michel Dvorak)

Il existe trois modèles principaux pour comprendre le handicap : 

  • le modèle médical,
  • le modèle sociétal 
  • et le modèle interactif

Le modèle médical considère le handicap comme une caractéristique individuelle causée par une maladie ou un accident, tandis que le sociétal pointe les inadéquations de la société face aux besoins des personnes handicapées. Le modèle interactif, quant à lui, considère que le handicap résulte d’une interaction complexe entre l’individu et la société.

Malheureusement, la discrimination envers les personnes en situation de handicap est encore très présente dans notre société. En France, les institutions doivent compter dans leur effectif 6% de personnes en situation de handicap, tandis qu’en Belgique, 77% des personnes déclarées souffrant de graves handicaps sont au chômage. Les espaces de travail et les logiciels ne sont souvent pas adaptés aux personnes déficientes. L’accessibilité est donc un enjeu d’inclusion numérique, mais pas uniquement pour les personnes en situation de handicap: l’accessibilité numérique concerne prône une meilleure ergonomie et la facilité d’accès à l’information.

Dans cette optique, le baromètre de la Fondation Roi Baudouin nous apprend, entre autres, que : 

  1. Près d’un Belge sur deux, soit 46% de la population, est en situation de vulnérabilité numérique : 7% n’utilisent pas internet et 39% ont de faibles compétences numériques.
  2. Outre le fait de devoir actualiser constamment les compétences existantes, il faut aussi en acquérir de nouvelles. C’est cet aspect dynamique qui explique la plus grande vulnérabilité numérique. 
  3. C’est surtout chez les personnes déjà vulnérables sur le plan socioéconomique et culturel que les compétences sont les plus faibles
  4. Les pourcentages de personnes avec des faibles compétences numériques sont en augmentation partout, et surtout en Flandre. La numérisation rapide de services en Flandre a été suivie par une hausse de l’équipement et des usages numériques, mais pas pour autant par une hausse des compétences numériques.

Quelques notions d’accessibilité numérique :

Voici ci-dessous 4 notions d’accessibilité numérique pour mieux comprendre les enjeux : 

✓ Image alt text: Pour qu’une image soit accessible, il faut lui donner un texte alternatif, également appelé texte alt. Ce texte n’est pas visible lorsque l’image est affichée, mais il est vu par les technologies d’assistance et les moteurs de recherche. Les images peuvent véhiculer un message, ou le cas contraire être des images décoratives : dans ce cas, elles doivent avoir un texte alternatif vide. Cela indique aux technologies d’assistance qu’elles peuvent ignorer ces images et éviter de lire à haute voix un nom d’image comme « 5426zbxd.jpeg ». 

En pratique : 

  • image véhiculant un message → text alt = “schéma qui représente les émissions de GES du secteur numérique”
  • image décorative → text alt = “”

Contraste: Pour que le texte soit lisible, le contraste entre le texte et le fond doit être suffisant. Si le contraste est faible, une personne malvoyante peut ne pas être en mesure de percevoir le texte. Il sera également plus difficile pour tout le monde de lire lorsque la lumière est trop forte (par exemple à l’extérieur) ou lorsque la lecture se fait sur un petit écran comme celui d’un smartphone. 

✓ Version mobile: Il est important d’optimiser le site pour les téléphones mobiles afin d’offrir une meilleure expérience utilisateur. Les utilisateurs qui visitent un site optimisé pour mobile pourront accéder au même contenu et aux mêmes fonctionnalités que sur un site consulté sur un ordinateur de bureau, sans problème de d’affichage. 

✓ Navigation au clavier: Une personne handicapée peut utiliser un clavier pour naviguer, au lieu d’une souris. Un site web doit être entièrement accessible au moyen du clavier, en utilisant des onglets pour passer d’une section à l’autre, d’un menu à l’autre, d’un champ de formulaire à l’autre, d’un lien à l’autre et à d’autres zones de contenu de manière prévisible et logique.

Normes et référentiels

Le World Wide Web Consortium (W3C) a créé une recommandation internationale et officielle : les Web Content Accessibility Guidelines (WCAG), pour rendre le contenu du web accessible au plus grand nombre d’utilisateurs possible. Une version simplifiée des WCAG a été proposée par WebAIM sous la forme d’une checklist

Le W3C, organisme de standardisation international, propose 10 vérifications faciles pour commencer à résoudre les problèmes d’accessibilité, comme : le contraste et le redimensionnement du texte, les boutons vides et le focus, le contenu interactifl’alternative sur l’image et le mouvement des éléments. 

Il est important de rappeler que les outils automatisés ne peuvent trouver qu’environ 30 à 40% des problèmes d’accessibilité, il est donc primordial d’avoir une intervention humaine/manuelle pour assurer l’accessibilité de ses contenus et services.

Pour se conformer, il est aussi possible d’utiliser : 

  • la norme européenne “EN 301 549
  • le RGAA (en france), qui correspond à la norme WCAG version 2.1 (AA)
  • le RAAM (Luxembourg) pour les app mobiles

En Belgique, AnySurfer est l’un des principaux acteurs en faveur d’un internet plus accessible. AnySurfer propose des conseils, des audits, des formations, de la documentation et un label sur l’accessibilité numérique. Vous pouvez également visiter le site de « Belgian Web Accessibility« , dédié aux services publics.

Voici 2/3 liens utiles pour comprendre et agir sur l’accessibilité numérique : 

✓ Le site “design-accessible » ; https://design-accessible.fr/  

✓ La documentation d’AnySurfer sur l’accessibilité numérique ; https://www.anysurfer.be/fr/documentation 

✓ Les posters de sensibilisation réalisés par le gouvernement anglais, disponibles en plusieurs langues : https://github.com/UKHomeOffice/posters/tree/master/accessibility/dos-donts 

Que dit la loi ?

La directive européenne sur les exigences en matière d’accessibilité des produits et services (directive (UE) 2019/882) est entrée en vigueur en décembre 2016 pour les sites web & apps des organismes publics, avec mise en application depuis 2019. 

Cette directive, qui devait être transcrite en droit national par les États membres pour juillet 2022, deviendra obligatoire pour le secteur privé en juillet 2025, dans le cadre de la loi européenne sur l’accessibilité : le European Accessibility Act

Cela signifie que les entreprises devront être conformes aux normes WCAG 2.1 en matière d’accessibilité numérique (y compris les systèmes d’exploitation, les sites web, les applications mobiles, les livres électroniques, etc.), avec une exception pour les micro-entreprises. Les petites entreprises sont elles exemptées, à moins d’avoir plus de 10 travailleurs et un chiffre d’affaires supérieur à 2 millions d’euros, ou si une institution utilise leur outil.

Pourquoi devriez-vous investir dans l’accessibilité numérique ?

Se préparer est un impératif, et les entreprises devraient commencer à y réfléchir dès maintenant, car cela pourrait être un processus lourd, similaire à certains des défis posés lorsque le GDPR est devenu obligatoire. À mesure que l’échéance approche, la demande (et les prix) de cette expertise vont probablement augmenter. 

Motivation commerciale : développer votre marché cible potentiel

Environ 15 à 20 % des personnes sont des personnes déficientes permanentes, 15-20 % sont des personnes en situation de handicap temporaire, et il y a également des personnes en situation de handicap situationnel. Si vous êtes la première entreprise accessible, vous obtiendrez une part importante de ce marché cible. L’accessibilité Web peut donc devenir un argument de vente efficace (source : webzine.okeenea).

Motivation RH : l’accessibilité améliore la cohésion interne

L’accessibilité Web peut également avoir un impact positif sur les équipes. Vous pouvez organiser des sessions de formation pour travailler sur les compétences de vos employés dans ce domaine, et ainsi les aider à mieux comprendre les besoins de vos utilisateurs. Cela peut également renforcer les valeurs communes de votre entreprise et améliorer leur sentiment de bien-être au travail.

Motivation image d’entreprise externe : responsabilité sociale et e-réputation

En tant qu’institution, vous pouvez inclure l’accessibilité Web dans votre responsabilité sociétale. Si vous êtes accessible, vous pouvez communiquer sur ce sujet et améliorer votre réputation auprès de vos clients. En revanche, si vous n’êtes pas accessible, cela peut représenter un risque pour votre e-réputation.

Raison d’innovation : créer au lieu de suivre les tendances

L’accessibilité Web peut également stimuler l’innovation dans votre entreprise. Cela peut vous permettre de vous différencier de vos concurrents et de répondre aux besoins de vos utilisateurs de manière plus efficace. C’est également une occasion de remettre en question certaines tendances qui peuvent être préjudiciables à l’UX et au SEO.

Premiers éléments pour améliorer votre accessibilité

Pour commencer votre voyage vers l’accessibilité numérique, il y a quelques points clés à retenir : 

  1. N’utilisez pas uniquement la couleur comme seul moyen d’obtenir l’information : cela peut rendre l’information inaccessible aux personnes atteintes de daltonisme ou ayant d’autres types de troubles visuels.
  2. Utilisez un texte alternatif sur les médias sociaux : les personnes utilisant un lecteur d’écran ont besoin d’un texte alternatif pour les images. Les principales plateformes de médias sociaux offrent désormais l’option de texte alternatif pour les images, ce qui facilite l’accessibilité pour tous les utilisateurs.
  3. Attention aux emojis sur les réseaux sociaux : évitez de remplacer les mots, la ponctuation ou les chiffres par ces derniers. En effet, ils ne sont pas bien lus par les lecteurs d’écran et ne sont donc pas accessibles aux personnes aveugles ou malvoyantes.
  4. N’utilisez pas de curseurs ou d’objets en mouvement automatique : cela peut être accablant pour les utilisateurs et rendre l’information inaccessible.
  5. Si vous avez un podcast, vous avez besoin d’une transcription : cela permet d’assurer l’accessibilité pour les personnes atteintes de déficience auditive, les étudiants, les professeurs, les journalistes, les spécialistes et tous ceux qui cherchent à trouver l’information entendue plus tôt. Cela améliore également le référencement.
  6. La charge disproportionnée : si vous prétendez qu’une exigence d’accessibilité représente une charge disproportionnée pour votre entreprise, vous devez prouver cette charge et fournir des alternatives.

L’outil de superposition (Ce sont des solutions logicielles automatisées qui prétendent détecter et résoudre les problèmes d’accessibilité du Web) n’est pas magique : l’utilisation d’un outil de superposition peut sembler être une solution facile pour l’accessibilité, mais cela peut en fait entraîner des violations du RGPD et de la sécurité, des conflits avec d’autres technologies d’assistance et une augmentation de la charge de travail pour les développeurs.

Pensez aux personnes avec des situation de handicap dans votre UX : avoir un ou deux personnes avec des handicaps dans votre équipe vous permettra de penser aux besoins de tous les utilisateurs et de vous assurer que votre produit est accessible.

Pour finir

Pour conclure cet article sur l’accessibilité numérique, il est important de rappeler que l’inclusion est la clé pour offrir une expérience utilisateur positive à toutes et tous. Grâce à l’accessibilité, chacun peut être plus autonome, participer activement à la société et trouver du plaisir dans les activités numériques.

Cependant, il est crucial de se rappeler que l’inaccessibilité peut causer de l’exclusion et priver certains de l’accès à des services et des informations importants. C’est pourquoi il est essentiel de trouver des professionnels pour aider à développer une culture d’accessibilité, en offrant des formations, en fournissant des conseils et en réalisant des audits.

Enfin, il est important de ne pas aller trop vite dans cette démarche, car l’accessibilité est une culture et un état d’esprit à adopter dans la durée. En travaillant ensemble et en prenant le temps nécessaire, nous pouvons tous contribuer à rendre le monde numérique plus accessible pour toutes et tous.

Article co-rédigé par Ambre Nicolaï d’Algorila et Jules Delcon de l’ISIT-Be

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